Les biens extérieurs (Sénèque) – Février 2013
“Ne vois dans ce qui t’entoure que du mobilier d’auberge. Tu n’es là que de passage.” (Sénèque, Lettres à Lucilius, 102, 24).
Cette citation, très courte, reprend la position stoïcienne vis-à-vis des choses extérieures. Comment comprendre cette nécessaire indépendance vis-à-vis des choses qui nous entourent et que nous possédons? Pour comprendre ce conseil stoïcien, il faut se rappeler le principe stoïcien que l’on trouve au début du Manuel d’Epictète et bien connu de tous les étudiants de philosophie: ce premier principe, c’est la distinction entre ce qui dépend de nous et ce qui ne dépend pas de nous. Or, le corps et les choses extérieures à nous-même ne dépendent pas de nous. Nous n’avons aucune prise sur elles, car elles peuvent nous être retirées, au gré des circonstances extérieures que nous ne maîtrisons pas. Du jour au lendemain, je peux perdre mes richesses ou ma réputation, sans que cela soit de mon ressort et sans que la cause soit mienne. Pourquoi, dès lors, s’attacher à ce qui ne dépend pas de nous, si ce n’est pour être troublé par la perte des biens que nous possédons ou par le désir d’acquérir ceux que nous ne possédons pas? La finalité de l’éthique stoïcienne, qui est la tranquillité de l’âme, et le bonheur qui en découle, nous donne ainsi la raison de cette réticence à s’attacher aux biens extérieurs: pour la préserver, on ne doit s’attacher aux biens extérieurs qu’à la manière de meubles d’auberge, qui ne nous appartiennent pas mais dont nous avons l’usage, pour un temps. Pour un temps, car le destin peut nous les reprendre, et nous les reprendra nécessairement à la fin de notre vie, puisque, comme le rappelle la deuxième phrase de la citation, nous ne sommes là que de passage!
Crédits: Ancienne auberge du Vieux Puits à Pont-Audemer, par Gérard Janot, Licence CC BY-SA.
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